Archives pour la catégorie Spectacles

« Têtes-Mortes » de Samuel Beckett

« Bing »

« Imagination morte imaginez »

« Sans »

« D’un ouvrage abandonné »

de Samuel Beckett

 

Mise en voix : Marie Lamachère

 
25 novembre 2013 : « Bing » et « Imagination morte imaginez »
26 : « Sans »
27 : « D’un ouvrage abandonné »

 

au théâtre La Vignette, à Montpellier

 

 

note personnelle : 4/5

beckett

Choix de mises en scène très lente avec beaucoup de corps, d’accompagnements physiques des mots de Beckett.
Par exemple, « Bing » qui fait six petites pages, dure trente minutes.
L’actrice donne un sens presque maladif à ce texte . C’est un choix. C’est pourtant un texte chantant, très rythmé, vivant. C’est un jeu de mots, de répétition, d’élans.

Evidemment, dans le texte, il y a les points mais il n’y pas de virgule. L’acteur est donc plus libre. C’est clairement un choix de récupérer du sens avec tout ce qui tourne autour des mots et qui est donné par l’acteur.
A mon sens, ça gâche un peu le texte, ça fait diversion. Il est en réalité à la fois plus aride et plus riche. Il reste cependant présent et lisible. Un régal !

Un court extrait :
« Pieds blancs invisibles talons joints angle droit hop ailleurs sans son. »

D’ailleurs, je crois que le mot qui décrit le mieux l’écriture de Beckett est : « vivant ». Pas toujours beaucoup, pas toujours pour longtemps, mais vivant.

 

 

« Sans doute » de Jean-Paul Delore

au Cloître des Carmes
du 21 au 24 juillet 2013
dans le cadre du Festival d’Avignon

 

 

 

note personnelle :3/5

 

SANS DOUTE -

photo Christophe Raynaud de Lage

 

Les acteurs sont répartis sur le plateau, il sont 12. Toute l’équipe, qui depui 10 ans participe aux spectacles de Jean-Paul Delore.
C’est plutôt un concert entrecoupé de quelques paroles dîtes et parfois chantées.
La musique est assez classique, rock, rock-progressif, jazz-rock, mais de qualité. Un peu décevant, ici, dans le festival. Seule une fille (Yoko Higashi), tout au bout, fait parfois de la musique de mixage vraiment très bonne.
Il y a la présence particulière de Dieudonné Niangouna qui parle, il est en robe longue satin gris, il met parfois un chapeau de fourrure longue avec trois longues dents devant qui lui barrent le visage. Il vit un peu sa vie, danse au fond, s’allonge sur la scène et se relève pour dire deux ou trois fois au micro à la fin d’une chanson : « elle a fini ? ».
Mais tous ont une personnalité sur scène, ça aurait valu le coup de les présenter à la fin comme lors d’un concert habituel. Jean-Paul Delore était, je pense, celui qui avait un maquillage rouge, comme un masque.
Les textes racontent des histoires personnelles, des espèces de petites scènes imagées comme des rêves, mais une ou deux fois il est question de post-colonisation, ce qui déclenche spontanément quelques applaudissements. Il est question de ce qu’on leur a pris, qu’on a ensuite construit des écoles pour leur apprendre à dire merci. (bof, est-ce bien obligé de mettre encore de l’anti-colonial, tout le monde est d’accord)
Je préfère la présence de Dieudonné Niangouna quand il se met à déblatérer une colère en parlant très vite, en étant incompréhensible pour nous mais aussi pour lui, entrecoupé de quelques mots lisibles.  C’est un moment beau, accompagné de musique folle.
La forme prime, ici. Tout est dans le langage, les gestes, la voix, son rythme. Ce qu’il dit est forcément moins intéressant que ce qu’il ne dit pas.

 

 

« Europeana, une brève histoire du XXe siècle » de Patrik Ouřednik

au Théâtre « Isle 80 »
dans le cadre du Festival d’Avignon Off

 

note personnelle : 2/5

 

Trois femmes en noir, rouge à lèvres appuyé, devant trois pupitres vont faire l’expérience de nous raconter le vingtième siècle. Elles ont une belle énergie pour fouiller le texte de Patrick Ourednik ,tentative d’une Histoire faite de mots, de scènes, de souvenirs collectifs.
Quand l’une raconte, les deux autres peuvent mimer ce qui est dit. A la libération sexuelle, elles deviennent sensuelles, et presque hypies. Lors de l’explication de la découverte de la psychanalyse, elles deviennent névrosées, se replient sur elles-mêmes.

 

 

« Germinal » d’Antoine Defoort et Halory Goerger

dans le cadre du Festival d’Avignon
au Théâtre Benoît Xll
du 16 au 24 juillet 2013

 

note personnelle : 3/5

 

defoort

Trois hommes et une femme, ne savent pas parler.
Ils se rendent compte qu’en utilisant des pupitres disposés sur le plateau, ils affichent leurs pensées. Ils arrivent à communiquer.
Ils peuvent intervertir leur emplacement, mais ça devient incompréhensible, ils décident donc de mettre leur nom avant toute parole.
la femme découvre que le sol a un bruit différent à un certain endroit. Elle va chercher une pioche et se met à défoncer une partie du plateau. elle sort des gravats un micro. elle  utilise celui-ci en tapant sur la tête des autres, mais ça fait mal. Ils finissent par découvrir qu’ils peuvent faire un son avec leur respiration, et qu’ils peuvent varier les sons, et qu’ils peuvent carrément parler avec la bouche, et que c’est beaucoup plus pratique que d’écrire et de lire les pensées. L’un d’eux parle donc et dit les pensées de chacun et finit par inventer des dialogues à son avantage. les autres s’en rendent compte. Ils découvrent qu’ils peuvent parler tous les quatre.
Les scènes de découvertes se multiplient.
Ils vont chercher un sens à tout ça pendant que l’un d’eux continue à chercher dans le trou et en sort un parallélépipède rectangle (un ordinateur portable) et une guitare électrique.
A un autre endroit, ils vont découvrir une grosse baffle, qu’ils peuvent avec l’ordinateur faire pousser un sapin du plateau, changer de décor.
Tous les dialogues et toutes les découvertes sont amusantes et prenantes, ça s’essoufle un peu, sur la fin, lorsqu’il font trempette dans un nouveau trou du plateau appelé « étang » rempli de nouilles en polystyrène vert, qu’il n’y a plus vraiment d’action, seulement un résumé de celles qui ont déjà eu lieu.
La fin gâche un peu le plaisir, je me retrouve avec un gros recul, à regarder un spectacle dans lequel j’étais entièrement plongé.

« Ici s’écrit le titre de la pièce qui nous parle d’Ante » d’Ivor Martinic

au Théâtre des Doms
dans le cadre du Festival d’Avignon Off 2013

 

note personnelle 2/5

 

martinic

Relation entre père et fils (Ante), avec la voisine, la soeur du père, la copine d’école d’Ante qui voudrait être la copine tout court.
La seule mise en scène se fait sur un sol recouvert de moquette en damier, et les cinq acteurs se placent en fonction des relations qui s’engagent dans les dialogues, c’est abstrait mais ça passe presque inaperçu.
L’originalité de la forme est gâchée par un texte, lui, classique, linéaire dans la découverte et la compréhension de la situation des personnages.

 

 

 

« King Size » de CHRISTOPH MARTHALER

mise en scène CHRISTOPH MARTHALE
à Opéra-Théâtre
les 10 et 11 juillet 2013

dans le cadre du Festival d’Avignon

 

 

note personnelle : 2/5

 

marthaler

photo Simon Hallström

 

 

Au souvenir du décor de la Cour d’Honneur pour son spectacle « Papperlapapp » au Festival 2010, je suis déçu en voyant le décor à l’Opéra/Théâtre : une chambre à coucher faite de meubles de rangements et une tapisserie à fleurs. On est dans un vaudeville ou une opérette.

C’est principalement une suite de morceaux de musiques chantés. C’est de la musique allemande classique, mais ça va jusqu’à Claude François. La plupart des morceaux sont joués sérieusement. Ca décroche parfois; le chanteur se met à danser éxagérément, la chanteuse chante alors qu’elle sort juste la tête de dessous le lit, il y a des entrées et sorties intempestives d’une vieille femme et son sac à main, celle-ci se met à manger des pattes qui se trouvent directement dans son sac, elle essaye sans réussite de monter un chevalet de musicien, elle essaye d’ouvrir un placard haut sans y arriver.
Il y a peu de moments loufoques, on est quand-même bien à un concert chanté, il faut s’accrocher à l’humour, qui est souvent un peu lourd.
Ca commence d’ailleurs par un appel au public pour laisser les téléphone allumés, tousser et manger des bonbons avec des papiers d’emballage bruyants. Ce texte étant dit tout d’abord en allemand, puis en français, en italien, flamand, japonais.

 

 

 

« Ping Pung Qiu » d’Angélica Liddell

dans le cadre du festival d’Avignon

au Gymnase du Lycée Mistral

les 5, 6, 7, 9, 10, 11 juillet 2013

 

 

note personnelle : 4/5

 

PING PANG QIU -

Photo de Christophe Raynaud de Lage / Festival d’Avignon

 

 

Elle, Angélica, une perruque bleue, robe rouge. Eux, deux petits communistes en tenue d’apparat, plus un personnage avec habit de poils longs et jaune.

une de ces deux, maquillée grossièrement, assez laide, en pointes, appuyée à une table de ping pong, se met à faire quelques flexions , puis tape fortement le sol, avec sa pointe, en rythme, de façon répétitive.
À différents moments, l’un ou l’autre « décroche » ainsi et se met à redire ou refaire la même chose jusqu’à l’absurde.
Angélica se met à parler de son amour pour la Chine, elle sait que c’est un pays criticable.
Elle parle beaucoup. Elle parle des gens de théâtre, critique leur incompréhension face aux créateurs, de façon répétitive, comme le faisait Thomas Bernhard. Elle se met justement à parler de lui, de son texte dans lequel s’était reconnu un notable, ce qui avait fait interdire son ouvrage en Autriche.

Le spectacle se termine par une préparation de pattes chinoises, et finalement de partage et de lancé de pattes.
Entre temps, un distributeur de balles a été installé sur la table et en a projeté une quarantaine régulièrement.

Il y a des moments de tendresse où les deux actrices, face à face, s’embrasse une partie du corps, chacune à leur tour : le nez, le bras, le ventre la tresse, le front, la bouche…

Angélica est une sorte de furie, mécontente, toujours quelque chose à dire, entre autre sur la création, sur la poésie, sans avoir l’air, avec humour, et avec de la violence, mais contenue (caractère espagnole?!).

Exemple de texte d’Angélica Liddell (dans le programme) :
« Le poétique est un état critique, un état de crise face à quelque chose d’inexplicable. […] On a toujours cette sensation : l’impression que le langage n’est pas  à la hauteur de la souffrance humaine. Le poétique est là pour soulager cette frustration. »

C’est une mise en scène assez simple pour laisser parler l’auteure. Les accessoires, les autres acteurs, les répétitions longues (comme lorsque les quatre acteurs brandissent le petit livre Rouge avec un geste en avant du poignet qui se répète plusieurs minutes), les questions-relances d’un acteur sur le monologue d’Angélica, semblent parfois meubler le temps.
Je suis partagé. Je me rends compte que ce qu’elle dit est écrit, ses pièces sont d’ailleurs toutes disponibles à la sortie du spectacle, je vois que la construction est faite autour du texte et des idées contenues dans le texte (enfin, je suppose), et que tout le reste est comme un habillage. La question est sur l’habillage, est-il pertinent, y aurait-il moyen de faire autrement, cet habillage est-il  le style d’Angélica (je pense que son style est surtout sa façon de parler, de répéter, de progresser dans le discours, dans son attitude lorsqu’elle parle, cette nervosité permanente, cette colère qui font penser, décidément, à Thomas Bernhard) ?

 

 

 

« D’après une histoire vraie » de CHRISTIAN RIZZO

chorégraphie CHRISTIAN RIZZO
Création 2013
dans le cadre du festival d’Avignon

au Gymnase du lycée Aubanel
du 07 au 15 juillet 2013 (sauf le 11)

 

note personnelle : 4/5

 

D APRES UNE HISTOIRE VRAIE -

Photo Christophe Raynault de Lage/Festival d’Avignon

Le public était enthousiaste à la fin du spectacle. C’était très entrainant, une danse à la fois chaleureuse, retenue.
C’est surprenant de voir arriver petit à petit les danseurs (huit), tous des hommes, tous avec la barbe sauf un, avec des cheveux longs. Ils sont habillés de jeans gris plus ou moins foncés et de chemises également grises mais toutes différentes.
Leur danse se fait ample, savante, de gestes mesurés comme pour une cérémonie. Les genoux se  plis ensemble, les bras se lèvent au ciel, les mains derrière le dos, les jambes se déployent pour des mouvements très latéraux gardant tout le haut du corps fixe. Ils se réunissent parfois les uns à côté des autres en se tenant par la ceinture ou par les épaules (ce qui donne de belles images de bras se tenant, dans tous les sens), deux se détachent en se tenant par la main et en faisant passer un troisième sous ce pont tendu. Il y a de l’enfance dans ces prises de mains, dans la danse elle-même, alors qu’elle est structurée et sérieuse et pensée. C’est un mélange très curieux, intéressant.
Il y a des moments forts, des moments plus faibles où tous dansent seuls, où certains sont assis sur le côté et regardent les autres faire ( ça fait penser à la musique balinaise, avec ces coupures, ces reprises, mais aussi à de la musique et de la danse Souffi où un morceau s’arrête sans s’arrêter vraiment, il reste une base de rythme qui fait le lien, qui permet de rester dans le cérémonial).
Le tout est rythmé par deux percussionnistes qui jouent de la batterie (rock) sur scène, en accompagnant au plus près les danseurs.
C’est bien sûr très proche de cette danse Souffi, les mouvements (sauf la répétition jusqu’à la transe), les liens entre les danseurs, la percussion.
Ayant écouté cette musique Souffi, je ne peux m’empêcher de trouver la percussion présente manquant de richesse. Pour le coup (par rapport au commentaire précédant de « Logobi 05« ), la musique européenne est bien pauvre dans le rythme, trop binaire.
La danse peut aussi passer pour esthétisante au regard de la danse Suffi, codée, avec une histoire et une valeur de perte vers la transe ou simplement de perte de conscience du corps en tournant sur soi-même. C’est bien la représentation d’un corps lié à l’esprit qui est dans cette danse.

Ici, ne reste-t-il pas que la gestuelle et un semblant de rythme ?

 

 

« Logobi 05 » Gintersdorfer/Klassen

Logobi 05
conception Gintersdorfer/Klassen
dans le cadre du festival d’Avignon
09 – 10 – 12 – 13 – 14 juillet 2013
au Gymnase du lycée Saint-Joseph

 

 

note personnelle : 3/5

 

Logobi05

Drôle de duo. Deux garçons, un noir bodybuildé et un blanc plutôt maigrichon.
Ce dernier se met à danser sur une musique entrainante (hip-hop). Il a une danse coulante, ondulante, aérienne, légère. Le noir se met à faire une danse beaucoup plus présente et se met très vite à expliquer la différence entre la danse européenne et la danse africaine basée sur la cérémonie, comme un rituel où le corps serait guidé par un esprit et non pas par le danseur lui-même qui saurait ce qu’il veut dire en laissant le spectateur dans le questionnement. En exemple, il cite la danse minimale et la mime. C’est fait avec humour, tout en disant des choses de base, à penser, il exagère le trait sur la danse européenne en une critique vraiment simpliste. Il explique qu’une certaine danse contemporaine africaine est apparue, seulement pour les européens, à base de gestes de « Maoris » et de grimaces.
Il finit par montrer la danse Logobi, qui est une façon de faire de la place autour de soi pour danser, en n’hésitant pas à bousculer le voisin, en se tapant soi-même pour montrer ce que l’on peut faire pour te faire dégager.
L’autre danseur suit à sa façon, légère. Il prend tout à la rigolade, danse aussi autour. A un moment, ils enchainent de longs mouvements imbriqués tout en parlant de la difficulté de ces mouvements : c’est râté, ah non,  ça passe. Un moment fluide, langoureux, physique.

Spectacle plein d’énergie, curieux par ce mélange de danse et de paroles, qui est, d’après le programme une improvisation différente à chaque représentation. J’ai découverts aussi après le spectacle que les danseurs sur scène ne sont pas les auteurs ! Ce qui est surprenant et qui donne à penser que la conception est on ne peut plus collective.